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La tension était à son comble. Le premier essai de voyage dans le temps était prévu dans quelques heures. La base secrète soviétique, située à quelque 100 km au nord de Kiev, s’agitait comme jamais. Les deux grands projets de l’URSS étaient mis en concurrence : la conquête du temps et de l’espace. Et Nikita Khrouchtchev suivait ça avec beaucoup d’amusement, mais réclamait des rapports hebdomadaires. Signe qu’il y avait derrière des enjeux colossaux.
L’ingénieur Orlov rédigeait son dernier rapport. Il annota la date du 25 avril 1956 et l’heure précise : 21h44. Il soupira. Ils avaient déjà plus de trois heures de retard sur le planning. L’ingénieur alla rendre une dernière visite au « pilote du temps ». D’après lui, un bien grand mot pour un abruti qui ne fera que s’asseoir dans un fauteuil.
— Salut Dimitri, comment allez-vous ?
— Bien, monsieur Orlov, bien.
— Voici mon dernier rapport, je vous en laisse une copie même si je sais que vous ne le lirez pas.
— Ils ne me sont pas destinés, répondit agressivement le pilote.
— Non, en effet, mais ça montre votre implication dans le projet… Enfin soit, je suis tout de même venu vous souhaiter bonne chance.
— Merci m’sieur, grommela-t-il. Je dois encore définir la distance du saut temporel. Avez-vous une préférence ? demanda l’ingénieur. Après une courte hésitation, le pilote répondit :
— Mettez pile 30 ans, j’ai fêté mon anniversaire hier soir.
— Qu’il en soit ainsi.
1h02. L’ingénieur se tenait dans le poste de commande, derrière les techniciens qui vérifiaient en boucle toutes les mesures de la capsule du temporelle.
« Cinq minute avant le lancement » résonnait dans le haut-parleur. Derrière la grande vitre du poste de commande se dressait la machine à voyager dans le temps. Une sorte d’obus difforme. Une machine d’ingénieur, loin des fantasmes qu’aurait imaginé grand public. Le pilote avait un pouls stable. Tous les capteurs étaient au vert.
5…4…3…2…1… le technicien en chef pressa le bouton. Une décharge électromagnétique secoua toute la base.
26 avril 1986. 1h23. A 100 km au nord de Kiev.
…la radiolyse de l’eau conduit à la formation d’un mélange détonant d’hydrogène et d’oxygène. En 3 à 5 secondes, la puissance du réacteur n°4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl centuple.
Le pilote, un peu nauséeux, termine la procédure de sortie, enclenche l’écoutille d’ouverture avant d’avoir bien vérifier que la caméra tournait et commença à parler tout haut :
Quelques secondes pour un homme, mais des années pour l’hum…
Une violente explosion retentit, coupant le souffle du pilote. Les 1200 tonnes de la dalle de béton recouvrant le réacteur nucléaire sont projetées en l’air et retombent tels des projectiles sur le cœur du réacteur libérant un taux de radioactivité jamais atteint.
